Nirvana

NIRVÂNA Louis DE LA VALLEE-POUSSIN
EAN/ISBN : 9782701021188
Nb de pages : 194 p
Année : 1925
*On pense généralement que le Bouddha a tiré le Bouddhisme des systèmes dits orthodoxes ou brahmaniques, soit du Vedânta soit du Sâmkhya, en niant l’âme universelle du premier
ou les âmes individuelles du second. Le Bouddha aurait été le promoteur ou l’interprète d’une réaction anti-métaphysique, anti-ontologique, positiviste, en même temps qu’il libérait les consciences opprimées et les petites gens en créant un ordre anti-ritualiste, anti-sacerdotal, anti-régime des castes. Le Bouddhisme, dès son berceau, aurait été nihiliste.
Ces vues sont fausses, faussent l’histoire du Bouddhisme, faussent le Nirvana. Quelques développements secondaires d’ordre doctrinal qui l’aient enrichi au cours des siècles, le Bouddhisme sort, non pas de systèmes liés et précisés, mais d’un Yoga amorphe et qui sûrement n’était pas nihiliste.
Ceci posé, on se demande s’il ne convient pas de réviser, ou du moins de compléter, notre définition delà philosophie ancienne du Bouddhisme, et si la critique n’a pas accepté trop aisément l’authenticité au sens strict d’une littérature composite ; si, en même temps, elle n’a pas tort de rejeter, de cette littérature, des documents précieux qui gênent l’orthodoxie du Nirvana-néant. — Je ne suis pas certain que le Bouddha ait dit : « J’admets le fait de la sensation ; mais je nie l’existence d’un être qui sente », et j ’accepterais plus volontiers comme « authentiques » des déclarations qui sont naturelles dans la bouche d’un docteur qui prêche la délivrance : « Soumis par nature à la naissance, à la maladie, à la vieillesse, à la mort, j’ai cherché ce qui ni ne naît, ni n’est malade, ni ne vieillit, ni ne meurt… Il y a un non-né, un sans-vieillesse, un immortel, un non-causé : s’il n’y avait pas un non-né, il n’y aurait pas de refuge pour ce qui naît… »